Effet de la dégustation sur les comportements d'achat du melon

Quels leviers utiliser pour renforcer les ventes

Effet de la dégustation sur les comportements d'achat du melon
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Choisir un melon relève parfois du hasard, freinant l'achat par crainte d'une qualité décevante. En 2020, 92 % des consommateurs affirmaient qu'une garantie de qualité les inciterait à en acheter davantage. Si la vente avec conseils et service ne suffit pas à lever cette incertitude, la dégustation pourrait-elle être la clé pour rassurer les consommateurs et dynamiser les ventes ?

Publié le 01/07/2025

Temps de lecture estimé : 17 minutes

Risque perçu et comportements d'achat

En 2022 et 2023, le CTIFL a étudié l'impact du conseil et du service sur les achats de produits à faible demande, voir l'article Effet du conseil et du service par un vendeur sur les achats de fruits et légumes frais, publié dans le N° 402 d'INFOS CTIFL [1]. La présence de vendeurs influence significativement la décision d'achat et encourage les consommateurs à acheter de nouveaux produits. Cependant, pour le melon, la présence du vendeur n'a pas influencé les ventes. Les non-acheteurs considèrent le prix, l'aspect et la difficulté pour choisir le produit comme des freins à l'achat. Une enquête, réalisée par le CTIFL en 2020 auprès d'un échantillon de 944 acheteurs de melons charentais, révèle que près de la totalité des consommateurs de melons (92 %) seraient disposés à en acheter davantage s'ils étaient assurés de leur qualité au moment de l'achat. Les critères de sélection du melon ne sont pas toujours bien maîtrisés, ce qui donne l'impression que choisir un melon relève parfois de la « loterie » [2].

L'être humain est réticent à prendre des risques [3] : choisir des produits familiers offre un sentiment de sécurité et de confiance [4, 5, 6, 7], mais choisir un produit dont la qualité n'est pas observable représente un risque. Les consommateurs peuvent éprouver un sentiment de perte - perte financière, perte de satisfaction et perte du produit s'il ne correspond pas aux attentes et n'est pas consommé - lorsque la qualité du produit ne correspond pas à leurs attentes initiales. Pour atténuer l'aversion des consommateurs aux pertes, les entreprises peuvent partager des informations pour réduire leur incertitude quant à la qualité des produits et la perte psychologique qui pourrait en résulter. La présence d'un vendeur en rayon est également une solution potentielle. La compétence des vendeurs ressentie par les consommateurs les rassure, diminuant ainsi l'incertitude et le risque perçu lors de l'achat.

Lorsque le conseil et le service ne suffisent pas à lever les réticences [1], la dégustation, en libre-service ou animée par un vendeur, peut constituer une solution. La dégustation permet au consommateur de découvrir le produit et d'en apprécier la qualité avant de l'acheter. La présence d'un vendeur peut le mettre en confiance pour choisir le bon produit. La dégustation en libre-service et animée par un vendeur peut ainsi réduire la perception de risque liée à l'achat et le consommateur peut être plus enclin à effectuer son achat malgré sa réticence initiale. De plus, la dégustation permet de susciter l'intérêt en offrant une expérience sensorielle positive, directe et engageante. Mettre en avant des produits attrayants et appréciés augmente les chances de susciter l'intérêt du consommateur et de l'inciter à s'arrêter au rayon fruits et légumes.

Cette étude vise à identifier la forme d'assistance la plus efficace pour les produits, qui, bien qu'appréciés, suscitent encore des réticences en raison de la perception d'un risque à l'achat. Comment la dégustation de melon en libre-service ou servie par un vendeur influence-t-elle le comportement d'achat des consommateurs français ?

Design expérimental

Un cadre expérimental représentatif de la réalité du marché

Cette expérimentation est réalisée au sein de la zone expérimentale point de vente (ZEV) du CTIFL, du 26 juin au 11 juillet 2024. Elle comprend six références. Chaque référence est présentée verticalement dans des paniers de 60 x 40 cm : trois références à taux de pénétration élevé (forte demande), supérieur à 70 %, et trois autres à faible taux de pénétration (faible demande), inférieur à 40 % (Données d'achat Kantar). Afin de refléter le marché de manière réaliste, les produits à forte demande ont un facing de trois paniers et ceux à faible demande de deux paniers. Les prix pratiqués correspondent aux prix moyens observés sur le marché pendant les périodes de test (Figure 1). Pour éviter que la provenance n'influence les choix, les produits d'origine France sont privilégiés. Toutefois, en cas d'indisponibilité d'un produit en origine France, le premier approvisionnement sert de référence. Les préférences ou réticences liées à l'origine se reflètent ainsi de manière équivalente entre les différentes conditions expérimentales, ce qui permet d'isoler l'effet de la variable étudiée, à savoir l'impact de la dégustation sur les achats de melon.

Figure 1 : Assortiment proposé et prix affichés en rayon

Conditions expérimentales

L'objectif est d'analyser l'effet de la dégustation de melon sur les décisions d'achat des consommateurs et de déterminer si la dégustation permet de réduire l'aversion au risque* liée à l'achat de ce fruit. Trois traitements de vente en libre-service sont mis en place : un traitement sans dégustation (T1), un traitement avec dégustation en libre-service (T2) et un traitement avec dégustation proposée par un vendeur (T3). Le rôle du vendeur se limite à mettre en avant la dégustation sans intervenir activement auprès des clients pour conseiller ou servir, sauf en cas de question, et ce pour l'ensemble des six produits proposés. La dégustation permet aux consommateurs d'obtenir une information directe sur la qualité du melon avant l'achat. Cela peut potentiellement réduire leur aversion au risque et influencer leur comportement d'achat. De plus, la confiance des consommateurs pourrait être renforcée par la simple présence du vendeur, qui est souvent perçu comme une personne ayant une bonne connaissance des produits.

Pour chaque traitement, environ 90 consommateurs représentatifs de la population française sont recrutés, pour un total de 257 participants. La mission est identique : en plus d'un dédommagement pour leur participation, chaque consommateur dispose d'un budget de 25 € pour réaliser ses achats de fruits et légumes durant l'expérience. À l'issue de celle-ci, il conserve à la fois ses achats et la monnaie restante.

Les melons proposés pour cette expérimentation proviennent de trois lots* de melon charentais jaunes : un lot pour le traitement sans dégustation et deux lots pour les autres traitements. Pour chaque session des traitements avec dégustation (T2 et T3), le nombre de morceaux de melon proposés est standardisé à 30, afin que cela ne soit pas une variable d'influence. Lors d'une session, les melons destinés à la vente et à la dégustation proviennent du même lot, garantissant une qualité gustative et visuelle homogène. Une évaluation objective de la qualité organoleptique est réalisée par un panel entraîné au laboratoire d'évaluation sensorielle du CTIFL. Les traitements avec dégustation se sont déroulés sur deux semaines successives, avec un lot de melons par semaine. Les sessions des traitements T2 et T3 ont été randomisées sur cette période, assurant que chaque traitement soit associé de manière équitable aux deux lots lors des dégustations. Cette randomisation permet également de contrôler l'effet des variables externes, telles que la météo.

Mieux comprendre l'achat de melon

L'offre melon en point de vente

Facilité de choix et qualité perçue

Cette étude révèle des perceptions inattendues des consommateurs quant à la facilité de choisir un melon et à la qualité des melons disponibles sur le marché. Lorsqu'il s'agit de sélectionner un melon, les consommateurs ne semblent pas rencontrer de difficultés majeures. Sur une échelle de 0 à 10, où 0 représente une difficulté maximale et 10 une facilité totale, la note moyenne attribuée par les participants est de 7,6. Cela indique que, dans l'ensemble, les consommateurs se sentent relativement confiants dans leur capacité à choisir un melon. Cependant, la perception de la qualité des melons est plus nuancée : 77 % des consommateurs estiment qu'elle varie d'un achat à l'autre. En moyenne, la qualité des melons est jugée entre bonne et moyenne. Ainsi, même si les consommateurs déclarent se sentir à l'aise pour choisir un melon, cela ne garantit pas une satisfaction constante. La facilité perçue pourrait venir d'une certaine familiarité avec ce fruit, sans pour autant maîtriser les critères de sélection. Cela expliquerait pourquoi le choix semble facile alors que la qualité reste perçue comme incertaine. Ces perceptions soulignent l'intérêt des stratégies de dégustation en magasin, qui pourraient aider les consommateurs à mieux choisir et à renforcer leur confiance dans la qualité du produit acheté.

Critères de sélection d'un bon melon

Lorsqu'ils définissent ce qu'est un bon melon, les consommateurs privilégient clairement l'intensité des saveurs et l'arôme, tandis que la texture passe au second plan (Figure 2). Le critère jugé le plus important est la saveur sucrée. Vient ensuite le parfum, qui joue un rôle clé dans l'expérience sensorielle globale. La jutosité est classée en troisième position. En revanche, la texture, qu'elle soit fondante ou ferme, est reléguée au dernier rang.

Figure 2 : Les critères d'un bon melon

La dégustation lors de l'achat

Perception qualitative du melon dégusté

Les consommateurs des traitements avec dégustation T2 et T3 sont invités à citer les trois critères qui décrivent le mieux le melon proposé. Le classement des critères établi après dégustation reflète exactement le classement théorique du bon melon en général : en tête, la saveur sucrée mentionnée par 83 % des consommateurs, suivie par le parfum (63 %) et la jutosité (61 %). La couleur de la chair orange se classe en quatrième position, tandis que les caractéristiques de texture, telles que la fermeté et le fondant, arrivent en dernières positions. Alors que la perception générale des consommateurs relative à la qualité des melons sur le marché oscille entre « moyenne » et « bonne », le melon proposé lors de la dégustation est, lui, majoritairement considéré comme « bon » ou « très bon » (Figure 3). Cette appréciation positive est significativement liée à l'acte d'achat, soulevant ainsi la question : la dégustation permet-elle effectivement d'augmenter les achats ?

Figure 3 : Qualité du melon dégusté et achats

Profil sensoriel du melon dégusté

Les deux lots de melons dégustés sont caractérisés par des mesures instrumentales (poids, fermeté et indice réfractométrique) et des mesures sensorielles (Figure 4). Ces mesures permettent de réaliser des profils sensoriels qui quantifient les saveurs, la jutosité, la fermeté et l'intensité aromatique du melon. Le poids moyen des melons proposés à la dégustation est de 843 g (lot 1) et 875 g (lot 2). L'indice réfractométrique (IR) est de 14,7 % Brix (lot 1) et 15,9 % Brix (lot 2). Quant à la fermeté, elle est de 1,7 kg/0,5 cm² pour les deux lots. Le profil sensoriel du melon charentais est très hétérogène : les deux lots de cette expérimentaton sont, eux, assez homogènes et se distinguent par une couleur plus intense, un indice réfractométrique plus élevé et une intensité aromatique supérieure à la moyenne [8].

Figure 4 : Caractérisation sensorielle des deux lots de melons proposés à la dégustation


Achats et critères de choix

Actes et volumes d'achat

La dégustation de melon, en libre-service ou animée par un vendeur, n'a aucun impact significatif sur les décisions d'achat de melon que ce soit sur l'acte d'achat ou sur les volumes moyens achetés (Figure 5). Comme la proportion d'acheteurs de melon dans le traitement sans dégustation T1 est élevée (83 %), cela limite les possibilités d'observer une hausse significative des actes d'achat dans les traitements avec dégustation (85 % pour T2 et T3). Toutefois, les quantités achetées auraient pu évoluer à la hausse, ce qui n'est pas significativement le cas (Base 100, T1 : 113 ; T2 et T3 : 125). Cela peut s'expliquer soit par un impact insuffisamment fort de la dégustation, soit par des facteurs externes comme l'absence de besoin d'achat supplémentaire, les contraintes budgétaires, le manque de place pour stocker davantage de produits, etc. De même, l'aversion au risque des consommateurs, souvent liée à l'incertitude quant à la qualité du produit, n'est pas un facteur déterminant dans la décision d'achat de melon pendant l'expérience.

Figure 5 : Motivations à l'achat pour chacun des trois traitements étudiés

De manière générale, dans le cadre de cette expérimentation, les facteurs sociodémographiques, tels que le genre, l'âge, la composition du foyer, la catégorie socioprofessionnelle, le niveau d'éducation et le revenu, n'ont pas d'effet significatif sur les décisions d'achat de melon. Les facteurs contextuels comme la fréquence de consommation de fruits et légumes, le lieu d'achat principal pour les fruits et légumes (supermarché, marché local, etc.) et les conditions météorologiques perçues par les consommateurs au moment de l'achat n'ont également pas d'incidence significative sur l'acte d'achat de melon sur cette période d'étude et dans les conditions testées. Concernant l'influence des conditions météorologiques, la majorité des consommateurs ont décrit la météo du jour comme moyenne, bonne ou très bonne, moins de 7 % l'ont perçue comme « maussade » ou « très maussade ». Ainsi, l'analyse de l'effet de la météo sur les achats se limite à des conditions météorologiques plutôt favorables, sans période de mauvais temps.

Le melon, un achat anticipé ou impulsif ?

Alors que la majorité des consommateurs achètent du melon lors de l'expérience, seule la moitié avait prévu cet achat. La part des achats impulsifs est significativement plus élevée (p-value = 0,02) dans les traitements avec dégustation (T2 : 58 % et T3 : 51 %) que dans le traitement sans dégustation (T1 : 38 %).

Il peut sembler paradoxal que les achats impulsifs de melon soient plus fréquents dans les traitements avec dégustation (T2 et T3), alors que les volumes d'achat globaux restent relativement constants entre les traitements avec ou sans dégustation. Lorsqu'un consommateur goûte un melon, l'expérience sensorielle peut déclencher un désir d'achat impulsif. Cependant, cette impulsion pourrait être suivie d'une prise de conscience au cours de laquelle le consommateur comprend qu'il n'avait initialement pas prévu d'acheter ce produit. En revanche, sans dégustation, les consommateurs peuvent être tout aussi enclins à des achats impulsifs, mais l'absence de stimuli sensoriels ne déclenche pas cette prise de conscience liée à l'impulsion. Ce résultat constitue une piste de réflexion intéressante à approfondir.

Freins et motivations à l'achat

Les principales motivations d'achat observées à travers les traitements sont largement centrées sur le désir et le plaisir (Figure 5). Dans le traitement sans dégustation T1, les facteurs incluent l'envie de se faire plaisir, l'attrait visuel du produit et les conditions météorologiques qui suscitent l'envie d'achat. Pour les traitements avec dégustation (T2 et T3), la principale motivation à l'achat est la dégustation. En offrant une expérience sensorielle directe, elle éveille le désir d'achat et permet aux consommateurs de confirmer la qualité du produit avant l'achat. La dynamique de motivation est ainsi axée sur l'envie, renforcée par la confiance quant à la qualité que procure la dégustation. Bien que la dégustation n'ait pas conduit à une augmentation significative du nombre d'acheteurs ou des volumes achetés, elle demeure une motivation clé dans ces contextes. Dans le traitement avec dégustation en libre-service T2, un consommateur souligne que les melons sont « lourds, pas très odorants côté opposé à la tige, mais la possibilité de déguster m'en a fait prendre deux ». Cette remarque illustre bien l'impact direct de la dégustation sur la décision d'achat alors que d'autres indicateurs de qualité auraient pu dissuader l'achat sans cette expérience sensorielle.

Pour les non-acheteurs de melon, les principaux freins à l'achat incluent l'absence de besoin, souvent parce qu'ils en ont déjà, un manque d'envie et le prix. Dans les traitements avec dégustation T2 et T3, un autre facteur s'ajoute : la dégustation elle-même peut parfois devenir un frein à l'achat. Certains participants ont mentionné avoir goûté le melon mais ne pas l'avoir apprécié. Cette raison se classe ainsi en troisième position des motifs de non-achat.

Si la dégustation peut déclencher l'achat en rassurant les consommateurs sur la qualité du produit et en éveillant leur désir, elle peut également les dissuader lorsqu'elle révèle des caractéristiques gustatives qui ne répondent pas aux attentes.

Aversion au risque

Pour mesurer l'aversion au risque, lors du questionnaire post-achat, chaque participant devait choisir parmi cinq jeux hypothétiques de type « Pile ou Face », aux gains variables, allant de l'option la plus sûre à la plus risquée (Figure 6). La majorité des participants (64 %) présente une aversion forte au risque (option A et B), 10 % une aversion modérée (option C) et 27 % un goût pour le risque (option D et E). L'aversion au risque des participants n'influence pas de manière significative leur comportement d'achat de melons, malgré la perception de ce fruit comme un produit risqué à l'achat. En d'autres termes, les participants les plus averses au risque n'augmentent pas significativement leurs achats lorsqu'une dégustation est proposée en point de vente. Cependant, certaines variations méritent d'être soulignées. Parmi les plus averses au risque, les achats augmentent légèrement entre le traitement sans dégustation T1 et les traitements avec dégustation, passant de 81 % d'acheteurs en T1 à 87 % en T2 et 91 % en T3. Une hausse est également visible chez les participants éprouvant une aversion modérée au risque, où les achats passent de 71 % en T1 à 91 % en T2, puis se stabilisent à 88 % en T3. Les participants ayant un goût pour le risque affichent un niveau élevé d'achat dans tous les traitements, atteignant un pic de 94 % en T3. Cette constance, renforcée par l'effet de la dégustation, illustre leur plus grande propension à acheter du melon, même lorsqu'il existe des incertitudes quant à la qualité du produit.

Figure 6 : Jeux hypothétiques de type

Niveau de confiance des consommateurs

La dégustation n'influence pas de manière significative l'aversion au risque des consommateurs quant à la qualité des melons proposés. En moyenne, la moitié des participants trouvent qu'il est difficile de juger la qualité du melon qu'ils viennent d'acheter, quel que soit le traitement auquel ils sont exposés. Environ 30 % des consommateurs estiment que l'achat de l'un de ces melons pourrait représenter une perte d'argent, sans différence significative entre les traitements, bien que ce pourcentage soit légèrement plus élevé dans le traitement sans dégustation T1. Par ailleurs, environ 80 % des consommateurs expriment une confiance dans la qualité des melons et 70 % sont certains que ces melons sont de bonne qualité.

La part d'acheteurs de melon reste relativement stable, indépendamment des difficultés perçues à évaluer la qualité du produit avant l'achat. Cependant, une corrélation est observée entre le niveau de confiance des consommateurs quant à la qualité des melons proposés et leur décision d'achat : plus les consommateurs ont confiance dans la qualité des melons, plus leur propension à acheter augmente. Malgré cette tendance, la part d'acheteurs demeure élevée, même parmi ceux qui ne sont pas entièrement convaincus de la qualité du produit, avec environ 60 % d'achats. En revanche, lorsque les consommateurs perçoivent un risque financier plus élevé, estimant que l'achat d'un melon pourrait se révéler être une perte d'argent, les achats tendent à diminuer. Dans ce cas, les consommateurs sont moins enclins à en acheter que ceux qui ont des doutes sur la qualité (Figure 7).

Figure 7 : Perception du risque, niveau de confiance et achats

Panier d'achat

Composition du panier

Proposer une dégustation en rayon pourrait susciter l'intérêt des consommateurs en magasin et influencer leurs décisions d'achat pour les autres fruits et légumes présents. Les résultats confirment cette hypothèse : la dégustation du melon en libre-service conduit à une hausse significative des achats de fraise (p-value < 0,01). En revanche, la dégustation avec vendeur T3 n'a aucun effet significatif sur le nombre d'acheteurs de fraise (Figure 8). À l'inverse, alors que, dans les traitements T1 et T2, les achats se répartissent de manière équitable entre une ou deux barquettes, voire trois barquettes pour 10 % des acheteurs en T2, les consommateurs du traitement dégustation avec vendeur T3 optent majoritairement (70 %) pour l'achat d'une seule barquette. Pour rappel, dans le traitement dégustation en libre-service T2, les achats impulsifs de melon sont significativement plus fréquents que dans le traitement sans dégustation T1 et légèrement plus élevés que dans le traitement dégustation avec vendeur T3. De plus, les consommateurs en achètent des quantités légèrement plus importantes. Toutefois, il n'y a pas de différences significatives dans les raisons d'achat de fraise entre les trois traitements. La motivation principale reste le plaisir.

Les autres produits présents en rayon ne sont ni positivement ni négativement impactés par la dégustation, qu'elle soit en libre-service ou avec vendeur. Ainsi, la dégustation en libre-service contribue à une augmentation significative (p-value < 0,01) du panier moyen : tandis qu'il s'élève à 16 € dans les traitements T1 et T3, il atteint 19 € dans le traitement T2 (Figure 8).

Figure 8 : Composition des paniers selon le traitement

En conclusion, la dégustation en libre-service ne se limite pas à stimuler l'achat impulsif de melon, elle semble également encourager une disposition générale plus ouverte aux achats. Dans notre étude, ce sont les produits dits complémentaires qui ont été impactés, sans perturber les autres achats. Toutefois, il serait pertinent d'approfondir cette analyse en élargissant la gamme des produits proposés en rayon. Cela permettrait de mieux comprendre quels types de produits sont affectés par ce type de dégustation : s'agit-il de tous les fruits en général, de produits spécifiques comme les fraises ou d'un sous-ensemble de produits aux caractéristiques particulières ?

La place du melon au sein du panier

Le melon représente une part importante du panier des consommateurs, occupant en moyenne 33 % de sa valeur, quel que soit le traitement. L'augmentation du nombre de melons achetés se traduit par une hausse quasi-proportionnelle du panier total, avec une part relative du melon qui devient de plus en plus prépondérante à mesure que les achats de melon augmentent (Figure 9). Cette dynamique s'explique par la stabilité des autres achats : les consommateurs maintiennent, en moyenne, les mêmes quantités pour les autres produits, peu importe le nombre de melons achetés. Ainsi, l'ajout de melon au panier ne s'accompagne pas d'un effet de substitution. Ces observations suggèrent que promouvoir l'achat de plusieurs melons pourrait constituer une stratégie efficace pour accroître le panier moyen, sans impact négatif sur les ventes des autres produits.

Figure 9: Part du melon dans la composition du panier

Analyse coût-bénéfice de la dégustation

Afin d'évaluer la rentabilité des différentes techniques de vente, une analyse coût-bénéfice est réalisée. Cette analyse repose uniquement sur les différences de coûts spécifiques entre les trois traitements. Les coûts communs, tels que ceux liés au personnel pour la mise en rayon ou l'encaissement, ne sont pas comptabilisés puisqu'ils sont identiques pour l'ensemble des traitements. Les marges calculées sont semi-nettes : elles intègrent les recettes générées, les coûts d'approvisionnement spécifiques à chaque traitement, ainsi que, pour les traitements avec dégustation, les coûts additionnels liés à cette animation. Pour ces derniers, le coût d'achat des melons destinés à la dégustation est inclus et estimé à 1 melon pour 15 consommateurs. Il en est de même pour le temps de travail du personnel pour la découpe qui est estimé à 10 minutes par melon, soit 2,86 € par melon découpé, avec un coût horaire de 17,16 €/h, charges sociales incluses. Dans le traitement dégustation avec vendeur (T3) s'ajoute également le coût du vendeur dédié à la mise en avant de la dégustation en rayon dont le salaire brut avec charges sociales est estimé à 17,16 €/h. Les revenus issus des ventes sont calculés sur la base des prix appliqués pendant l'expérience. Les coûts d'achat des produits sont, quant à eux, estimés à partir des cours du Réseau National des Marchés (RNM), ajustés par un coefficient pour prendre en compte les frais logistiques d'approvisionnement.

Les résultats montrent que les consommateurs dépensent davantage lors de la dégustation en libre-service T2 (Figure 10). Toutefois, la rentabilité de ce dispositif varie en fonction de l'affluence. Le traitement sans dégustation T1 reste plus avantageux jusqu'à environ 6 clients. Au-delà de ce seuil, la dégustation en libre-service T2 s'impose comme l'option la plus rentable. En revanche, la dégustation avec vendeur T3 ne permet pas d'augmenter significativement le panier moyen par rapport au traitement sans dégustation T1. Il affiche donc un panier moyen inférieur à celui observé avec la dégustation en libre-service T2. Compte tenu des coûts additionnels liés à la présence du vendeur et à la mise en place de la dégustation, la dégustation avec vendeur T3 présente une rentabilité systématiquement inférieure à celle des ventes en libre-service, qu'elles intègrent ou non une dégustation.

Figure 10 : Balance coût-bénéfice entre les trois traitements étudiés

Attentes des consommateurs

Vente avec ou sans vendeur ?

Concernant la présence d'un vendeur dans le rayon, une majorité claire de consommateurs (80 %) exprime une préférence pour le libre-service. Cette préférence ne semble pas liée à la fréquence de consommation générale de fruits et légumes (p-value = 0,09). Cependant, il existe une corrélation significative entre la fréquence de consommation de fruits et légumes frais et l'attrait pour la vente avec vendeur (p-value < 0,01) : les consommateurs qui consomment régulièrement des fruits et légumes frais sont plus enclins que les autres à préférer un rayon avec vendeur. Des différences significatives apparaissent également en fonction du lieu principal d'achat des fruits et légumes (p-value < 0,01). Ceux qui achètent leurs fruits et légumes principalement au marché ou chez un primeur sont plus partagés entre le libre-service et la vente avec vendeur, tandis que ceux qui achètent en grande surface plébiscitent le libre-service. En revanche, aucune différence significative n'est observée en fonction du genre, de l'âge ou de la composition familiale des consommateurs. Ces résultats sont cohérents avec les conclusions des études menées par le CTIFL en 2022 et 2023 [1]. Il apparaît également un effet significatif du revenu (p-value = 0,01) et de la catégorie socioprofessionnelle (p-value < 0,01) : 33 % des cadres préfèrent la vente avec vendeur, contre seulement 13 % des professions intermédiaires, 12 % des employés et 14 % des personnes sans activité professionnelle.

Les études sur l'assistance à la vente menées en 2022 et 2023 montrent que les participants du groupe Libre-Service préfèrent majoritairement ce mode d'achat, tandis que ceux du groupe Conseils et Service sont plus partagés [1]. Cette tendance se confirme dans cette étude, où les consommateurs du traitement dégustation avec vendeur T3 sont significativement plus nombreux (p-value = 0,01) à exprimer une préférence pour ce mode de vente : 31 %, tandis qu'ils sont en moyenne 14 % à préférer la vente avec vendeur dans les traitements T1 et T2.

Pour les consommateurs, il est crucial de pouvoir effectuer leurs achats à leur propre rythme, le facteur le plus important dans un rayon de fruits et légumes. Le temps de comparer les prix est le deuxième facteur. Lors des études « Conseil & Service » menées en 2022 et 2023, recevoir des conseils en magasin était classé en troisième position. Dans cette étude « Dégustation », la possibilité de déguster les produits a pris cette troisième place, reflétant une évolution des attentes en fonction des expériences d'achat passées. En effet, ces attentes sont relativement influencées (p-value = 0,06) par le traitement auquel les consommateurs sont assignés, tant en 2022-2023 [1] qu'en 2024 (Figure 11). Les principaux freins à l'achat en rayon fruits et légumes avec vendeur sont la contrainte de temps, principalement due au temps d'attente en rayon (premier frein) et l'incapacité à faire ses achats à son propre rythme (deuxième frein). Les études de 2022 et 2023 montrent que les consommateurs acceptent d'attendre de manière occasionnelle, mais cette contrainte devient problématique lorsqu'elle est répétée [1]. Un rayon avec vendeur est ainsi perçu négativement, avec un sentiment de perte de liberté, notamment pour des raisons telles que « On ne peut pas prendre le temps de comparer les prix », « On ne peut pas effectuer ses achats à son rythme » et « Les vendeurs insistent trop », qui figurent parmi les freins les plus cités par les consommateurs (Figure 12).

Figure 11 : En rayon fruits et légumes frais, il est important pour vous de ...

Figure 12 : En rayon fruits et légumes avec vendeur, vous n'aimez pas ...

Dégustation en libre-service ou avec vendeur ?

Alors que la majorité des consommateurs montre une préférence marquée pour la vente en libre-service plutôt que celle avec vendeur, leurs opinions divergent lorsqu'il s'agit de la dégustation. En effet, 40 % des consommateurs préfèrent une dégustation avec vendeur. Cette préférence est significativement influencée par le genre (p-value

Définitions

Aversion au risque : Tendance des individus à éviter les situations perçues comme incertaines ou risquées, même si elles offrent des gains potentiels plus élevés. À l'inverse, une personne qui aime le risque sera davantage attirée par les opportunités comportant des incertitudes, motivée par la perspective de gains plus importants.

Lot : Ensemble homogène de produits de la même espèce et variété, avec une origine géographique commune (même producteur, même région), une récolte effectuée à la même date et des caractéristiques de calibre et de qualité identiques

Comprendre les p-values

La p-value est un indicateur statistique qui permet de mesurer la probabilité que les résultats observés soient dus au hasard.

- p < 0,01 (1 %) : Les résultats sont hautement significatifs. Il y a moins de 1 % de chances que les résultats soient dus au hasard.

- p < 0,05 (5 %) : Les résultats sont statistiquement significatifs. Il y a moins de 5 % de chances que les résultats soient dus au hasard.

- p < 0,10 (10 %) : Les résultats sont faiblement significatifs. Il y a moins de 10 % de chances que les résultats soient dus au hasard.

- Au-delà de 10 % (p > 0,10), les résultats sont considérée comme statistiquement non significatifs.

* Les mots suivis d'un astérisque sont expliqués dans l'encadré « Quelques définitions »

Les données clés à retenir

Effet de la dégustation sur les comportements d'achat du melon - Quels leviers utiliser pour renforcer les ventes

Le choix du melon paraît simple pour les consommateurs bien que sa qualité semble aléatoire. La dégustation, en libre-service ou animée par un vendeur, n'influence pas directement les achats ni les volumes mais favorise les achats impulsifs. L'expérience sensorielle renforce l'envie et aide à valider la qualité avant l'achat. En libre-service, la dégustation profite aux autres produits du rayon, tandis qu'avec vendeur, elle focalise l'attention sur le melon et peut limiter certains achats. Le melon représente un tiers de la valeur du panier et une augmentation de son achat entraîne une hausse quasi-proportionnelle du panier total, sans effet de substitution. Si la vente en libre-service est largement privilégiée, les avis divergent sur la dégustation : près de 40 % des consommateurs préfèrent la présence d'un vendeur, une préférence influencée par le genre.

Key points

The effect of tasting on melon purchasing behaviour- How can in-store tasting be leveraged to boost sales?

Choosing a melon seems straightforward for consumers, even if its quality seems uncertain. Tasting, whether alone or with a shop assistant, does not directly influence purchases or volumes, but it does encourage impulse buying. The sensory experience reinforces desire and helps to validate quality before purchase. Tasting without a shop assistant benefits other products on the shelf, while with a shop assistant, it focuses attention on melon which may limit certain purchases. Melon accounts for a third of the value of the shopping basket, and an increase in its purchase leads to a quasi-proportional increase in the total shopping basket, without any substitution effect. While self-service sales are widely preferred, opinions differ on tasting: almost 40% of consumers prefer the presence of a sales assistant which is a preference linked to gender.

Bibliographie / Sitographie

[1] D. Lima Rente, « Effet du conseil et du service par un vendeur sur les achats de fruits et légumes frais. », INFOSCTIFL, no 402, p. 4 à 9, 2024.

[2] C. Baros, P. Cavard-Vibert, M. Serrurier, et X. Vernin, « Le Melon : Distribution et consommation », CTIFL, 2021.

[3] D. Kahneman et A. Tversky, « Prospect Theory: An Analysis of Decision under Risk », Econometrica, vol. 47, no 2, p. 263, mars 1979, doi: 10.2307/1914185.

[4] H. Tuorila, L. Lähteenmäki, L. Pohjalainen, et L. Lotti, « Food neophobia among the Finns and related responses to familiar and unfamiliar foods », Food Qual. Prefer., vol. 12, no 1, p. 29-37, janv. 2001, doi: 10.1016/S0950-3293(00)00025-2.

[5] Y. Martins et P. Pliner, « Human food choices: An examination of the factors underlying acceptance/rejection of novel and familiar animal and nonanimal foods », Appetite, vol. 45, no 3, p. 214-224, déc. 2005, doi: 10.1016/j.appet.2005.08.002.

[6] A. R. H. Fischer et L. J. Frewer, « Consumer familiarity with foods and the perception of risks and benefits », Food Qual. Prefer., vol. 20, no 8, p. 576-585, déc. 2009, doi: 10.1016/j.foodqual.2009.06.008.

[7] I. N. Jung, A. Sharma, et A. S. Mattila, « The impact of supermarket credibility on purchase intention of novel food », J. Retail. Consum. Serv., vol. 64, p. 102754, janv. 2022, doi: 10.1016/j.jretconser.2021.102754.

[8] V. Cottet, « Projet de recherche 2024-2025 : Qualité gustative et attentes des consommateurs de Melon Charentais », 2024.