Le projet BIOVIMED
Le projet BIOVIMED évalue des produits de biocontrôle contre l'oïdium et le mildiou sur vignes. Pour la lutte contre l'oïdium, en période de fortes chaleurs et de stress hydrique, le soufre est remplacé par des produits de biocontrôle pour éviter les risques de fortes brûlures. Pour la lutte contre le mildiou, l'objectif des produits de biocontrôle est de limiter les risques de contamination précoce, tout en retardant au maximum les apports de cuivre.
Les stratégies d'application ne tiennent pas compte des règles actuelles de déclenchement de la protection telles que mentionnées dans le Guide des Vignobles 2024/2025 Rhône Méditerranée. Les essais ont été mis en place sur 16 parcelles du pourtour méditerranéen : 7 parcelles pour la lutte contre l'oïdium et 9 parcelles pour la lutte contre le mildiou.
Oïdium
Modalités de traitement
L'essai Oïdium repose sur sept modalités présentées dans la figure 1 : une modalité témoin sans traitement, une modalité témoin de vraisemblance, une modalité de référence avec un traitement conventionnel et quatre modalités dont les applications varient après nouaison (soufre ou biocontrôle). Chaque parcelle évalue plusieurs modalités mais pas toujours les sept.
En début de saison, toutes les modalités, sauf celle non traitée, reçoivent le même traitement soit 4 à 8 kg/ha de soufre mouillable par application, dosé selon le volume végétatif et le stade phénologique. À partir de la fin floraison-nouaison, les traitements sont différenciés. Pour évaluer l'intérêt du produit de biocontrôle, il convient de comparer son comportement à celui de la modalité témoin de vraisemblance qui correspond au « soufre arrêté après nouaison ». Les produits de biocontrôle testés sont le Vitisan, le Carpet et le Taegro. Le Taegro est évalué sur une année en remplacement du Sonata dont la commercialisation est arrêtée.
Au cours des trois années, il est difficile de conclure sur les produits de biocontrôle tant les niveaux de contaminations sont variables en fonction des sites et des années. La pression parasitaire varie en fonction de la vigueur de la parcelle, voire de la vigueur des ceps au sein d'une même parcelle. Dans la plupart des essais, la protection contre l'oïdium durant la préfloraison est déterminante. En effet, les modalités à base de produits de biocontrôle ne se différencient pas de celles à base de soufre ni de la modalité « Soufre après la nouaison » (Figure 2).
Dans les essais où il y a eu des problèmes de phytotoxicité, soit trois parcelles sur sept, les brûlures sont essentiellement observées sur les modalités « Soufre pleine dose » et « Soufre dose réduite ». L'absence de marquage par phytotoxicité avec les produits de biocontrôle est intéressante pour la filière raisin de table.
En ce qui concerne les essais de la chambre d'agriculture et du GRAB, menés en condition « producteur », le produit de biocontrôle choisi est le Taegro, car il présente un intérêt et est testé par plusieurs vignerons. Dans la majorité des essais, le Taegro a montré une bonne efficacité, parfois égale au soufre, dans les conditions de l'année et des sites. Dans tous les essais, l'oïdium est bien maîtrisé jusqu'à nouaison (Figure 3).
Le Taegro pourrait être une bonne solution de substitution au soufre lors d'épisodes de fortes chaleurs.
Bilan économique
Le bilan économique ne présente que le coût des produits, auquel il faut ajouter le coût des passages de tracteurs qui s'élève à environ 20 € le passage.
Le bilan économique est établi pour chaque modalité et est présenté dans la figure 2, en situation de faible et de forte pression. Sur toutes les parcelles, le remplacement du soufre par les produits de biocontrôle entraîne un surcoût important : de 14 à 171 % d'augmentation par rapport à la modalité 100 % soufre. L'augmentation dépend du nombre de traitements réalisés et du type de produit employé (Figure 4).
Mildiou
Modalités de traitement
L'objectif est de valider l'intérêt des produits de biocontrôle contre le mildiou en début de saison et de sécuriser leur mise en oeuvre tout en limitant le risque de contamination primaire. Pour cela, les premiers traitements sont déclenchés précocement, avant l'apparition des contaminations primaires, c'est-à-dire dès le stade 2-3 feuilles étalées. Les traitements sont renouvelés tous les 10 jours, sauf si la pression est forte. Dans ce cas, les traitements sont resserrés à 7 jours voire moins en cas de lessivage.
L'essai repose sur neuf modalités : une modalité témoin sans traitement, une modalité de référence avec un traitement préventif et sept modalités alternatives utilisant du cuivre ou des produits de biocontrôle. Chaque parcelle évalue plusieurs modalités mais pas toujours les neuf.
Pour les différentes modalités cupriques, la dose de cuivre utilisée est celle recommandée par l'OAD Décitrait soit entre 75 g et 450 g de cuivre métal par hectare. Certaines années, les essais sont réalisés en conditions de contamination artificielle et de brumisation pour augmenter la pression de mildiou parfois trop faible. Les solutions de biocontrôle testées sont le Roméo, le Limocide, le Salix/Arvense (en alternance) et le Belvine. L'association Roméo et Limocide a été testée, mais arrêtée car le coût associé était trop élevé.
Au cours des trois années d'essais, la stratégie « début du cuivre à la sortie des 1ers foyers » est intéressante. En effet, il s'agit du meilleur compromis entre quantité de cuivre, nombre de traitements (coûts de production) et efficacité de protection (Figure 5). Cependant, lorsque la pression mildiou est forte, comme ce fut le cas en 2024, la stratégie cuivre très précoce est celle qui présente la meilleure efficacité. Après la sortie des premiers symptômes et avant la tombée des pluies suivantes, il faut anticiper la protection cuprique.
Concernant les biocontrôles, la modalité alternant Salix et Arvense ne s'est pas différenciée de la modalité témoin non traité, dans les conditions d'application et météorologiques des essais. De plus, les modalités Belvine (1 an de recul) et Roméo ont montré une faible efficacité dans la plupart des essais. La modalité associant deux produits de biocontrôle n'a pas montré d'intérêt en termes d'efficacité de protection par rapport au coût de production. Le seul produit qui présente une efficacité parfois intéressante est le Limocide. Ce produit a été utilisé à différentes doses selon les essais (entre 0,8 et 1,6 l/ha), en fonction du volume de bouillie appliqué situé entre 100 et 150 l/ha (Figure 6).
L'objectif recherché est de retarder au maximum les premières applications de cuivre. Pour cela, la protection initiale est réalisée avec des produits de biocontrôle. Le nombre d'applications de produit de biocontrôle a varié selon les essais, allant de 5 applications en situation de forte pression mildiou à 8 applications en situation de faible pression mildiou (Figure 7).
Bilan économique
Comme pour la stratégie oïdium, l'utilisation de produits de biocontrôle pour lutter contre le mildiou augmente le coût de la protection de 40 à 376 %. Ce surcoût est plus important en situation de faible pression parasitaire quand le nombre d'application de produits de biocontrôle est plus important. Ce bilan économique ne présente que le coût des produits, auquel il faut ajouter le coût des passages de tracteurs, soit 20 €/ha/passage (Coûts des fournitures, 2024) (Figure 8).
Pour conclure
En fonction des sites et des années, le bénéfice apporté par les produits de biocontrôle est variable. Dans la lutte contre l'oïdium, les efficacités des stratégies sont globalement bonnes et dépendent avant tout d'une bonne protection prénouaison. Le bénéfice des applications de produits de biocontrôle en fin de cycle (postnouaison) n'est pas systématique. Cependant l'utilisation de biocontrôle en cette saison permet de sécuriser l'efficacité de la stratégie tout en réduisant les risques de brûlures.
Dans la lutte contre le mildiou, les efficacités du Limocide sont variables mais généralement intéressantes. D'autres essais testant l'association de Limocide et de cuivre présentent des résultats plus favorables que le cuivre seul. Cela permet de réduire les doses de cuivre par hectare (Figure 9).
Les données clés à retenir
Stratégies innovantes de protection du raisin avec des produits de biocontrôle - Projet BIOVIMED
Pour tenir compte de l'évolution du contexte climatique (précocité et raccourcissement des stades phénologiques, canicule, accélération des vitesses épidémiques, etc.), le projet BIOVIMED évalue sur trois ans l'efficacité de produits de biocontrôle contre l'oïdium et le mildiou. Les essais sont conduits en petites parcelles avec une application à l'aide d'un pulvérisateur à dos. Pour l'oïdium, Taegro se révèle une alternative efficace au soufre en conditions chaudes, sans risque de brûlure. Une protection préfloraison reste néanmoins indispensable. Pour le mildiou, seul le Limocide présente un intérêt, à condition d'être intégré dans une stratégie cuivre ajustée à la pression.