Les fruits et légumes dans la consommation des ménages

Évolution de leur poids dans le budget des ménages

Les fruits et légumes dans la consommation des ménages
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À partir des comptes nationaux établis par l'INSEE, cet article fait le point sur l'évolution de la consommation des ménages, par grands postes de dépense, puis dans le domaine alimentaire. L'évolution de la consommation de fruits et légumes des ménages peut ainsi être replacée dans un cadre plus général.

Publié le 01/01/2025

Temps de lecture estimé : 9 minutes

En 2023, une consommation des ménages au ralenti

D'après l'INSEE1, le volume de consommation des ménages a connu une franche décélération en 2023 (+0,8 %), après des rebonds en 2021 et 2022, consécutifs à la crise sanitaire de 2020 (Figure 1). En 2022 déjà, mais plus encore en 2023, l'inflation, liée au contexte géopolitique et à l'augmentation des prix de l'énergie puis des produits alimentaires, a freiné le développement de la consommation en volume. La progression du pouvoir d'achat par unité de consommation est ainsi restée quasi-nulle avec +0,3 % en 2023, après -0,4 % en 2022. Sur l'ensemble de la décennie 2013-2023, le volume de consommation des ménages a augmenté de +1,1 % par an, un rythme inférieur à celui des prix, en hausse de +1,9 % par an. Toutefois, cela reste largement imputable au niveau d'inflation connu en 2022 et en 2023, alors qu'il était resté beaucoup plus modéré entre 2013 et 2021.

Figure 1 : Évolution du pouvoir d'achat du prix et du volume de consommation des ménages

Une consommation guidée en valeur par l'inflation

En 2022, la première source de croissance en valeur de la consommation des ménages (+8,1 %) était l'inflation (+4,9 %), devant le volume de consommation (+3,1 %). En 2023, la tendance s'accentue. Le volume de consommation est quasi stable (+0,8 %), la progression en valeur (+8 %, ou +5,7 % hors Sifim, voir l'encadré Méthodologie - Pourquoi une analyse hors Sifim) étant presque exclusivement tirée par celles des prix (+7,1 % ou +4,8 % hors Sifim).

Dans le domaine des produits de grande consommation et frais libre-service, comme dans celui des produits frais traditionnels, Kantar confirme ces évolutions au travers de son panel de ménages acheteurs, avec une hausse des dépenses principalement guidée par l'inflation et des quantités achetées en baisse. La baisse du volume de la consommation, notamment dans le domaine alimentaire, s'est également accompagnée d'arbitrages accrus des consommateurs en faveur de produits moins valorisés : entrée de gamme, marques de distributeurs, promotions, catégories essentielles, etc.

En 2023, l'alimentation particulièrement impactée par l'inflation

Le premier poste de dépense des ménages est toujours celui consacré au logement, chauffage, éclairage. C'est également le principal poste de dépenses pré-engagées, c'est-à-dire sur lesquelles les ménages peuvent difficilement se restreindre à court terme. Son poids dans la dépense totale de consommation a atteint un pic en 2020 (30,3 %), avant de régresser progressivement jusqu'en 2023 (28 %), soit un poids inférieur à il y a dix ans (-0,8 point). En 2022 et en 2023, le volume de consommation des ménages en électricité, gaz et autres combustibles a notamment diminué : -10,4 % en 2022 suivi de -3,3 % en 2023, dans un contexte de températures clémentes et de comportements de sobriété énergétique encouragés par des prix toujours en nette augmentation (+15 % environ en 2022 et en 2023).

Sur cette même période, les transports ont retrouvé leur place de deuxième poste de dépense des ménages (13,3 %), avec deux années de progression en volume : +6,4 %, puis +3,8 %. En particulier, en 2023, les achats de véhicules ont très nettement progressé (+12 %), portés notamment par le marché des véhicules électriques ou hybrides. Par ailleurs, si les achats de vélos reculent pour la deuxième année consécutive après un pic atteint en 2021, le volume de consommation en services de transport reste bien orienté avec +10,4 % en 2023.

Portées par le confinement et le développement du télétravail pendant la crise sanitaire, l'alimentation et les boissons non alcoolisées hors restauration hors domicile RHD ont occupé le deuxième poste de dépense des ménages en 2020 et 2021. Toutefois, en 2023, le volume de la consommation alimentaire diminue sensiblement pour la deuxième année consécutive : -3,2 %, après -2,5 % en 2022. Cette baisse intervient dans un contexte d'accroissement significatif des prix : +12,1 % en 2023, après +7,2 % en 2022. En 2023, l'alimentation est ainsi le poste de dépense affichant la plus forte hausse de prix, entraînant un net accroissement de la consommation en valeur (+8,6 %). Cependant, par rapport à 2022, toutes les composantes de la consommation alimentaire sont concernées par une diminution en volume, à l'exception des céréales et des produits à base de céréales (stables). Les diminutions les plus fortes sont observées pour les poissons (-8,3 %), les huiles et graisses (-6 %), les légumes (-5,4 %) et les viandes (-4,1 %). Ces reculs peuvent être rapprochés de franches hausses des prix pour ces catégories de produits (Figure 2).

Figure 2 : Consommation alimentaire effective des ménages en 2023, par fonction

Néanmoins, une partie de la baisse constatée du volume de la consommation alimentaire semble pouvoir s'expliquer par l'accroissement de celui de la consommation en restaurants et services d'hébergement. En effet, en 2023, ce poste de dépense présente la plus franche progression en volume avec +5,5 %, après deux années de rattrapage (+15,6 % en 2021 et +37,7 % en 2022), consécutives à la chute de 2020 (-30,8 %). La progression encore plus forte de la consommation en valeur en restauration et hébergement (+10,8 %) conduit ce poste à représenter environ 8,5 % de la dépense totale de consommation des ménages depuis 2022, soit deux points de plus qu'il y a dix ans. Entre 2013 et 2023, les restaurants et services d'hébergements sont ainsi le poste de consommation dont le rythme d'accroissement en volume a été le plus fort (+2,8 % par an), derrière les « Communications » (+3,8 % par an), et ce malgré une progression du prix supérieure à celle d'ensemble (+2,3 % par an).

Consommation alimentaire : les céréales en progrès depuis dix ans

Au-delà d'une diminution de la part de l'alimentation dans le budget des ménages principalement mesurée entre 1960 et 1990, voir l'encadré Le budget alimentaire des Français depuis 1960, la dépense alimentaire continue de connaître des évolutions. Tout d'abord, la part accordée par les ménages à l'alimentation hors domicile continue de progresser : de 12,7 % en 1960, elle a atteint 30 % en 2019, avant de chuter en 2020 (22,7 %), puis de reprendre sa progression, pour s'établir à son plus haut niveau observé en 2023, avec 32,1 %. Par ailleurs, entre 1960 et 2023, plusieurs des principaux postes de dépense ont régulièrement perdu des parts dans le panier moyen des ménages, en raison de rythmes d'accroissement de leur volume d'achat inférieurs à celui de la consommation alimentaire totale (+1,8 % par an). C'est le cas des viandes (+1,1 % par an), des fruits et légumes (+1,4 % par an) ou encore des céréales (+1,2 % par an). Au contraire, les produits sucrés (+2,4 % par an), les boissons non alcoolisées (+2,9 % par an) et surtout les plats préparés (+4,1 % par an) ont connu les progressions les plus fortes.

La viande reste le premier poste de dépense alimentaire mais ne pèse plus que 18,4 % des dépenses, contre plus de 25 % au début des années 1990. Cette diminution résulte de volumes ayant progressé moins vite que ceux des autres catégories alimentaires. Au cours des dix dernières années, cette tendance s'est accrue : diminution sensible du volume de consommation des viandes avec -1,8 % par an entre 2013 et 2023, contre +0,3 % pour l'ensemble des postes alimentaires. Cette diminution est, en partie, attribuable à une progression supérieure du prix des viandes comparée à celle des produits alimentaires dans leur ensemble : +2,8 % par an pour la viande, contre +2,4 % par an pour l'ensemble des produits alimentaires. La progression des comportements alimentaires réduisant la viande avec les régimes végétariens, végétaliens, véganes ou encore flexitariens y est probablement aussi liée2.

Sur l'ensemble de la période 1960-2023, la catégorie des « céréales et produits à base de céréales » dont le pain conserve, elle aussi, un rythme d'accroissement de son volume de consommation inférieur à celui de la consommation alimentaire globale. En revanche, cette tendance s'inverse depuis dix ans. En effet, entre 2013 et 2023, les céréales ont vu leur volume de consommation progresser beaucoup plus fortement, avec +2,3 % par an, que l'ensemble des postes alimentaires et leurs +0,3 % par an. Les céréales sont ainsi en passe de devenir le premier poste de dépense alimentaire, devant les viandes, avec un poids dans la dépense alimentaire des ménages atteignant près de 18 % en 2023, contre 15 % en 2013.

La part des fruits et légumes frais ou transformés dans la dépense alimentaire des ménages s'établit à 17,4 % en 2023 en valeur (Figure 2). Cela représente une progression d'un point par rapport à 2013. Cependant, cette hausse est essentiellement imputable à l'accroissement du prix : +3,8 % par an pour les fruits et +3,4 % par an pour les légumes, contre +2,4 % par an pour l'ensemble des produits alimentaires. Le volume de consommation demeure en revanche quasiment stable.

La part de la dépense alimentaire consacrée aux produits laitiers et aux oeufs affiche une relative stabilité depuis les années 1980. Elle s'établit à 13,1 % en 2023 (-0,1 point par rapport à 2013). En revanche, depuis dix ans, le maintien de la part de cette catégorie dans la dépense alimentaire est essentiellement attribuable à l'évolution de son prix (+2,4 % par an de 2013 à 2023), puisque le volume consommé reste stable.

Par rapport à 2013, la catégorie des poissons et autres fruits de mer est celle dont le volume de consommation a diminué le plus fortement, -3,3 % par an, en lien avec une progression de prix particulièrement dynamique, +3,6 % par an. Avec un nouveau franc recul du volume de la consommation en 2023 (-8,3 %), la part de la dépense alimentaire consacrée aux poissons et fruits de mer s'établit à 4,1 % (-1,2 point par rapport à 2013).

Depuis 1960, la catégorie des plats préparés et autres produits alimentaires reste celle dont la progression en volume a été la plus forte, +4,1 % par an. Elle est aussi celle dont le prix a augmenté le plus modérément (+3,1 % par an contre +3,8 % pour l'ensemble des catégories alimentaires). Cela se vérifie encore sur la période 2013-2023, avec une progression de la consommation en volume supérieure à celle des autres catégories, +2,5 % par an, et l'accroissement de prix le plus contenu, +1,2 % par an. Par ses atouts de praticité, cette catégorie continue donc de progresser dans l'alimentation des ménages, en accompagnant les modifications de leur mode de vie comme la diminution du temps consacré à la préparation des repas au domicile notamment. Cela impacte avant tout la consommation des produits bruts non transformés, tels que les viandes, poissons ou fruits et légumes frais.

Les fruits et légumes frais cèdent du terrain

Entre 2013 et 2023, le volume consommé de légumes frais se contacte, -0,8 % par an, contrairement aux préparations et aux conserves de légumes, +1,2 % par an, ou encore aux légumes coupés ou emballés, +1 % par an (Figure 4). A contrario, le prix moyen des légumes a augmenté plus vite en frais, +4 % par an, qu'en préparations et conserves, +2,1 % par an, et coupés ou emballés, +1 % par an. Ces évolutions inverses entre frais et transformé se vérifient également pour la pomme de terre. Par ailleurs, le volume consommé de catégories indirectement « concurrentes » des légumes frais comme le riz (+1,8 % par an), les pâtes (+2,9 % par an) ou les plats préparés en général (+1,6 % par an) évolue plutôt favorablement. Ces catégories présentent également des progressions de prix plus modérées que les légumes frais.

Figure 3 : Répartition de la valeur liées à la consommation des fruits et légumes frais et des produits

En fruits frais, la diminution du volume de la consommation est plus modérée qu'en légumes, -0,3 % par an, malgré un accroissement du prix comparable, +3,9 % par an (Figure 4). Toutefois, la consommation de fruits frais se caractérise par l'évolution inverse de ses deux principales composantes : si les fruits tempérés restent majoritaires, leur volume de consommation est en recul, -1,1 % par an, alors que celui des fruits exotiques progresse, +2,7 % par an. À titre d'exemple, entre 2013 et 2023, le panel Kantar montre une augmentation des quantités achetées d'avocat (+3,8 % par an) et de mangue (+2,8 % par an) alors que celles de fruits « métropolitains3 » sont en recul (-1,9 % par an). Par ailleurs, l'évolution du prix reste plus franche en fruits tempérés, +4,2 % par an, qu'en fruits exotiques, +3 % par an. Parmi les catégories de fruits transformés, le volume consommé de jus se montre lui aussi en baisse (-2,3 % par an). C'est également le cas des fruits coupés ou emballés (-1,2 % par an). Toutefois, dans ce cas, une grande partie de la baisse reste imputable à la chute de la consommation de 2020, un rebond ayant été observé les deux années suivantes, avant un nouveau recul en 2023, dans un contexte de net accroissement du prix. D'autre part, la consommation de confitures, gelées, compotes et purées de fruits reste bien orientée, +1,3 % par an, avec une hausse de prix relativement modérée, +1,8 % par an. Enfin, à titre de comparaison, d'autres catégories de produits non directement « concurrentes » des fruits frais affichent des progressions du volume consommé supérieures, ainsi que des progressions de prix plus modérées, comme les glaces et sorbets ou la pâtisserie.

Figure 4 : Évolution de la consommation de légumes et des fruits  frais et des produits

Méthodologie - Pourquoi une analyse « hors Sifim » ?

Les services d'intermédiation financière indirectement mesurés (Sifim) sont inclus dans le poste de dépense des ménages « assurance et services financiers ». Ils correspondent aux marges d'intérêt des banques sur les dépôts et les crédits à la consommation des ménages. Il s'agit d'un revenu financier théorique des ménages, utilisé directement pour consommer ce service. Or, en 2023, le prix des Sifim a augmenté de façon exceptionnelle (+193,5 %), en raison d'une hausse à un niveau inédit du taux de référence interbancaire, conséquence de la politique monétaire en réponse à l'inflation persistante. En 2023, le poids en valeur du poste « assurance et services financiers » a ainsi atteint 8,2 % dans la dépense totale de consommation des ménages, contre environ 6 % entre 2009 et 2022. Ainsi, afin notamment de fournir une mesure de l'évolution depuis 10 ans du poids respectif des postes de dépense des ménages par fonctions, l'analyse présente dans cet article raisonne exceptionnellement sur un périmètre constant de « dépense de consommation des ménages, hors Sifim » (Figure A).

Figure A : Consommation effective des ménages en 2023, par fonction

Le budget alimentaire des Français depuis 1960

À hauteur de 21 % en 2023, le poids de l'alimentation (au sens large, soit les produits alimentaires et boissons, alcoolisées ou non, à domicile ou hors domicile) dans la dépense totale de consommation des ménages est beaucoup plus faible qu'en 1960 (33 %) (Figure B). En effet, depuis cette date, la consommation alimentaire en volume a progressé à un rythme beaucoup plus modeste (+1,8 % par an) que celui de l'ensemble de la consommation (+2,7 %). Entre 1960 et 2023, d'autres postes de consommation ont connu des progressions en volume beaucoup plus fortes, comme ceux concernant les technologies de l'information et de la communication (+10,8 % par an), les loisirs, sport et culture (+2,9 % par an) ou encore le logement chauffage éclairage (+3,1 % par an) et les transports (+2,9 % par an). Toutefois, la diminution du poids de l'alimentation dans la dépense totale de consommation des ménages est principalement observée entre 1960 et le milieu des années 1990. Depuis, la part de l'alimentation s'est montrée beaucoup plus stable, demeurant le plus souvent légèrement en deçà des 20 % entre 2000 et 2020. Son accroissement en 2022 et 2023, guidé par l'inflation, marque donc un rebond notable.

Figure B : Évolution de la part de l'alimentation dans le budget des ménages, y compris boissons alcoolisées et restauration hors domicile

1 « La consommation des ménages ralentit nettement dans un contexte d'inflation élevée », Insee Première n° 2002, juillet 2024.

2 « Combien de végétariens en Europe ? », LES ETUDES de FranceAgriMer, édition d'octobre 2019

3 Le périmètre des fruits métropolitains de Kantar regroupe pomme, poire, kiwi, fraise, abricot, pêche-nectarine, cerise, prune, petits fruits rouges et raisin

Les données clés à retenir

Les fruits et légumes dans la consommation des ménages - Évolution du poids des fruits et légumes dans le budget des ménages

En 2023, la consommation des ménages ralentit nettement dans un contexte de forte inflation (+7,1 %), en particulier les produits alimentaires (+12,1 %). Les volumes consommés baissent fortement en poissons, huiles et graisses ou en légumes. Après un recul brutal en 2020, l'alimentation hors domicile a repris sa progression (32,1 % en 2023). Concernant la consommation au domicile, les plats préparés croissent en volume plus fortement que les produits bruts. Tirée par les prix, la part des fruits et légumes frais ou transformés atteint 17,4 % de la dépense alimentaire en 2023. Cependant, depuis dix ans, le volume de consommation des fruits et légumes frais diminue, en lien avec des hausses de prix plus importantes que chez leurs principaux « concurrents » transformés, dont les volumes sont globalement en progrès.

Key points

Fruit and vegetables in household consumption - Change in the share of fruit and vegetables in household budgets

In 2023, household consumption slowed sharply against a backdrop of high inflation (+7.1%), particularly for food products (+12.1%). Volumes consumed fall sharply for fish, oils and fats and vegetables. After a sharp decline in 2020, out-of-home food consumption has resumed its upward trend (32.1% in 2023). In terms of in-home consumption, prepared dishes are growing more strongly in volume terms than raw products. Driven by prices, the share of fresh or processed fruit and vegetables will reach 17.4% of food expenditure in 2023. However, over the last ten years, the volume of consumption of fresh fruit and vegetables has been falling, as a result of higher price rises than for their main processed competitors', whose volumes are improving overall.